J’ai dans ma cuisine une boite de café.
C’est une boite à grains, hermétiquement fermée.
Le motif noir et blanc me rappelle des jours heureux,
Dans un autre pays, ou le café est délicieux.
Quand je l’ouvre quelquefois pour remplir la machine,
Ou aussi, de temps à autre, si quelque chose me chagrine,
Le parfum m’enveloppe et je ne peux résister.
Je renifle plusieurs fois, je me laisse enivrer.
Et la chaleur est là, de nouveau, pour me réconforter.
Puis, telle cette héroïne de ciné, je prends l’air malicieux,
Je prépare ma main lentement, dressant mes doigts aventureux.
Je les glisse doucement dans la boite de café,
Pour sentir les grains tendrement me caresser.
Alors, comme quand le morceau de madeleine amolli par le thé,
Arrive aux lèvres de cet écrivain fatigué,
Les souvenirs me reviennent, ceux du vieil épicier,
Avec sa moustache, ses yeux rieurs, et son accent ensoleillé.
Il disait toujours à ma mère « Laissez, laissez ! »
Lorsque je plongeai ma main dans les gros sacs de grains.
Tous ces plaisirs de l’enfance, rangés dans un coin,
Remisés, engloutis, au fond du cerveau, sous les soucis,
Regagnent soudain mon cœur, dans un grand charivari.
Les odeurs, les sensations, jaillissent en une onde colorée.
Des papillons virevoltent dans mes entrailles fleuries.
Mais il faut avancer, faire couler le café.
J’appuie sur le bouton, la tasse se remplit.
Le cœur est réchauffé, le moment s’est enfui.

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